Saint Grégoire Palamas.

Saint Grégoire Palamas est né en 1296 à Constantinople. Il est d'une famille noble exilé d'Asie.

Sa famille est proche de l'empereur Andronic II Paléologue et il sera très tôt orphelin de père. Grégoire fait des études mais choisit la vie monastique et se retire en 1316, à 20 ans au Mont Athos.

Il s'initie à la vie d'ermite et il rejoindra la communauté de la Grande Laure de Saint Athanase.

Il va poursuivre l'expérience de la pratique de l'hésychasme pendant quelques années.

 

Du mot grec hésychia, qui, dans l'hellénisme chrétien, désigne le «silence» et la «paix» de l'union à Dieu, l'hésychasme consiste en une méthode ascétique et mystique, «art des arts et science des sciences», qui est au cœur de la spiritualité de l'Église orthodoxe. Il s'agit de «désinvestir» la conscience du flot des logismoï (images et pensées «passionnelles», idolâtriques) pour la «faire descendre  dans le «cœur», qui est le centre d'intégration potentiel de l'être total et que le baptême a uni à l'humanité déifiée et déifiante du Christ. Alors, l'hésychaste prend conscience — d'une manière opérative — de la «grâce baptismale», de l'«énergie divine» présente à la racine même de son être.

Cette unification de l'homme-en-Christ utilise l'invocation du nom de Jésus sur le rythme de la respiration et, finalement, celui du cœur, car le corps de l'homme a été créé pour devenir le «temple du Saint-Esprit». D'où le nom de «prière de Jésus ou «prière du cœur» donné à cette méthode, véritable analogue de certaines méthodes asiatiques (dhikr musulman, japa-yoga hindou, nembutsu japonais), mais analogue chrétien (en effet, la perspective est celle d'une communion personnelle avec Dieu).

L'hésychasme — dont les racines bibliques et surtout johanniques sont évidentes — est attesté dès les origines du monachisme, aux iii et iv siècles; il s'affirme au Sinaï, avec saint Jean Climaque, au vii siècle, puis connaît deux grandes renaissances à partir de l'Athos, l'une au xiv siècle, l'autre autour de 1800. À l'époque actuelle, avec la dispersion orthodoxe, la « prière de Jésus » se répand dans beaucoup de milieux occidentaux, provoquant un discret mais profond « œcuménisme des contemplatifs ». En témoigne notamment la publication entreprise, dans la collection Spiritualité orientale, des textes fondamentaux de la tradition hésychaste.

(Olivier Clément pour Encyclopédie Universalis)

 

Il sera ordonné prêtre en 1326, puis il fondra un ermitage à Berrhée avec 10 moines. Plus tard, il retournera à la Sainte Montagne.En 1335.Il écrit « Les Traités apodictiques sur la procession du Saint-Esprit », afin d'éviter un compromis sur le filioque au profit d'une alliance plus politique que théologique. Il y aura alors en , 1337 et 1341 La lutte contre Barlaam le Calabrais.

Barlaam, qui est moine et philosophe défendait l'idée que la connaissance de Dieu ne se faisait que par le raisonnement sur la création, qui gardait ainsi une empreinte divine. Il attaqua aussi l'hésychasme de Saint Grégoire.

Saint Grégoire, après une étude approfondie des Pères développa sa théologie de l'essence divine imparticipable et des énergies participables en lesquelles Dieu est totalement présent,

Le 10 juin 1341, le Concile convoqué par Andronic III et le patriarche Jean Calécas, condamne Barlaam.

Mais Grégoire Hakindinos, également moine, reprit la controverse, acceptant l'hésychasme mais refusant la distinction essence-énergie.

La crise politico-religieuse de 1341 à 1347.

Au décès d'Andronic III, le patriarche Jean Calécas s'opposa au Régent Jean Cantacuzène par l'entremise de Grégoire Palamas. Ce dernier était favorable à Jean Cantacuzène, Grégoire Akindynos en profita pour attaquer Palamas qu'il fit emprisonner et excommunié en 1342-1344, malgré l'opposition de l'Impératrice Anne de Savoie. En 1347, l'Impératrice convoqua un Concile qui condamne à définitivement Akindynos. Le tomos de ce concile fut confirmé à Sainte-Sophie. En 1347, Grégoire est consacré métropolite de Thessalonique, mais ne prendra ses fonctions que 3 ans plus tard à cause des troubles politiques. Pendant ces 3 années, entre 1347 et 1350, il va écrire ses 2 œuvres majeures. D'abord, les 150 chapitres, physique, théologique, éthique et pratique, et ensuite les Triodes de défense des saints hésycastes.

Ensuite, il mena une vie d'évêque. Il fut capturé par les Turcs puis libéré contre rançon. Il rédigea ses 4 traités contre Grégoire. Il remit son âme à Dieu le 14 novembre 1359.


Il dira que la grâce est une expérience, d'où l'extrême difficulté d'écrire à son sujet.



Palamas explique que la connaissance de Dieu se fait progressivement à travers les prophètes et la foi, et qu'ainsi se réalise à nous le mystère de la Trinité qui est effectif avec le Nouveau Testament, mais que là encore, il y a une progression vers la déification en la vie future.

Cette grâce vient selon la volonté de Dieu, et pas seulement parce que l'on s'est préparé.

Elle est lumière, existe de toute éternité et son fruit le plus manifeste est la joie. Cette lumière est celle du siècle à venir. D'où l'importance de la lumière dans l'Église. Mais il y a un paradoxe. Dieu se révèle comme Trinité. Mais aussi comme inaccessible en Lui-même, mais accessible dans le don qu'il nous fait de Lui-même. Il y a distinction entre ce que Dieu est en dehors de tout et ce qu'il est pour et dans la création.

On peut brièvement indiquer qu'il y a une triple distinction en Dieu.

D'abord la Trinité, puis l'essence, puis l'énergie, mais un seul Dieu trinitaire agissant en son essence et son énergie.

L'essence divine ne s'identifie pas aux 3 hypostases qui la partagent, mais en une primauté existentielle de chacune des hypostases.

Le Père est la source.

Le Fils est engendré.

Et l'Esprit procède. 

Il faut noter que l'essence divine ne s'identifie pas à l'énergie. car elle en est la cause transcendante.

Mais cette essence peut se multiplier en la création et en l'homme en autant de réalités participables qu'il y a de participants. Cette énergie incréée est un effet de la bonté de Dieu à notre égard.

 

La synergie

Que faut-il faire pour être participant de ces énergies ? Tout ce que propose la vie chrétienne, mais ce ne sont que des moyens. L'homme lui-même ne peut se défier. Dieu, lui, ne peut contraindre l'homme au salut. Il faut donc une synergie divino humaine.

La question de l'image de Dieu en l'homme.

La chute par la désobéissance provoque l'altération de l'image de Dieu en l'homme. Ce péché est cause de corruption physique et psychique. Ce qui est altéré au plus haut point, c'est l'intelligence de l'homme dans ce qu'elle a de plus élevé, provoquant la perte d'une faculté originelle : voir Dieu.

Mais par Jésus-Christ nouvel Adam qui s'unit à notre humanité en sa personne divine, nous recevons non plus la mort, mais la vie.

Nous recevons la vie par les mystères sacramentaux de l'Église. Le baptême et l'Eucharistie, qui permettent une incorporation et une communion réelle au corps déifié et défiant du Christ. Ce corps contient la plénitude de la divinité et la source de la lumière incréée.

Le péché est perçu comme bouleversement du fonctionnement originel des puissances de l'âme, Ce n'est plus la partie raisonnable qui domine et gouverne mais la partie passionnée. D'où, pour Grégoire Palamas, la nécessité de l'impassibilité, de la tempérance, de l'amour et de la vigilance.

La Sainte Trinité n'est pas objet de connaissance. Mais c'est elle qui connaît et quand cela lui semble bon elle se révèle.

Tout approche humaine, qu'elle soit apophatique ou cataphatique est du domaine de l'intellect. Seule l'illumination divine nous communique la vraie connaissance.

Pour Palams, la connaissance de la Trinité est un fait concret et empirique.

Cette expérience ne peut cependant contenir et limiter le mystère indéfini de la Sainte Trinité qui structure, limite et contient l'univers tout en restant au-delà de tout.



Les analogies de la Sainte Trinité dans la nature.

Par la nature et les créatures, l'homme qui est dans cet état naturel a une connaissance de Dieu d'avant la loi et les prophètes. Mais à partir des créatures nous ne pouvons concevoir que énergie et puissance de Dieu.

Sain Grégoire le théologien, dit de Naziance, en 390 dira: «il est vain et honteux de prendre dans les choses d'en bas l'image des réalités d'en-haut.»

Donc la connaissance naturelle et intellectuelle par la raison est spéculative mais pas théologique. Ceci oppose Barlaam qui milite pour une connaissance raisonnable aux Hésycastes.

Ainsi, en utilisant des images naturelles issues des créatures, le mystère de Dieu ne peut s'y refléter, mais uniquement ses énergies.

Les énergies divines reçoivent leur nom à partir des êtres créés, et l'essence à partir des énergies divines.

Par exemple la distinction sans séparation: Le soleil qui produit la lumière et les rayons qui la transmette mais cette image a des limites quant à l'inséparabilité qui diffère dans la distinction des hypostases.



L'homme, image de la Sainte Trinité.


L'homme a été façonné comme un initié et un adorateur terrestre de la Sainte Trinité.

Ainsi est-il dit dans la Bible: «Et Dieu dit, faisons un homme selon notre image et selon notre ressemblance.»

À la parole, qui est le Fils, et à celui qui engendre, qui est le Père, il y a le souffle qui révèle l'Esprit. Les 3 sont concernés.

La nature humaine est une manifestation de l'être et du mode d'être de Dieu, Image créée de Dieu pourvu d'une intelligence, le noûs, pourvu de la parole, le logos et pourvu de l'esprit, le pneuma.

Selon l'image: dans le noûs se tient l'image. Le noûs est aussi une image de Dieu, mais une image ternie par la chute.

L'homme possède, comme les anges, la vie selon les sens, mais en plus selon l'énergie. Car ayant reçu un corps et la puissance de le vivifier, l'âme a une vie propre distincte du corps. Mais l'âme selon l'énergie est apte à recevoir les contraires. Donc en un sens, elle est composée.

Le noûs ne peut concevoir les contraires, car la bonté est pour lui une essence et non une qualité. L'homme possède la capacité de créer. Il possède le libre arbitre et l'âme est réalité unique aux puissances multiples.



Évoquons quelques triades.

Le Mouvement éternel de Dieu dans la Trinité est un Mouvement d'amour, éros, et de charité, agapé dans le Dieu trinitaire, que l'on nomme la périchorèse. Nous allons voir comment Saint Grégoire Palamas distingue l'existence de Dieu, qui est l'essence et la manifestation de Dieu, qui sont les énergies,

Dieu père.

Dieu est un, seule cause par rapport au Fils et à l'Esprit. Il est un seul principe. Une seule nature divine commune aux 3 personnes. Fils et Esprit ont leur existence de lui, unique source et non à partir de l'essence, quoi que non sans elle, car seul principe non engendré qui ne procède pas sans cause.

C'est un père vierge.

Le Père, par le Fils dans le Saint-Esprit, produit, ramène et maintient de bonnes façon toute chose. Le père est contemplé dans un Fils et un Saint-Esprit, seul engendreur spirateur, Père des Lumières.

Le mode d'existence du Dieu trinitaire c'est le père. Le mode de manifestation, œuvre commune aux 3 personnes. Dieu est d'abord Père et ensuite Dieu. La paternité est la propriété incommunicable de son hypostase. D'une autre façon, Dieu est Père comme Créateur des êtres, créés par le Fils dans l'Esprit Saint.

Quelles sont les propriétés du père?

Il est , sans principe, sans cause, il engendre le Fils et il fait procéder l'Esprit. Le père est plus grand selon l'ordre et la cause.

Les propriétés du Fils sont d'être engendré du Père. Il prend tout du Père sauf sa propre hypostase.

Il n'est pas possible de voir une hypostase sans essence. Donc l'engendrement est l'œuvre de la nature du Père et non l'œuvre de sa volonté. C'est une distinction essentielle qui évite la confusion entre Dieu et la création. La création est volonté des 3. Elle est sans commencement et intemporelle car coéternel au Père. Le Fils à l'Esprit qui repose en lui-même sans qu'il participe à la procession. Le fils fait connaître et envoie l'Esprit. Quant à l'Esprit, il demeure une personne incompréhensible. Il cache sa gloire.Il procède du père, il est issu de la nature ou de l'essence. L'engendrement du fils est de la nature, mais selon l'hypostase du père. Quant au Fils, nous savons qu'il existe comme engendré mais pas comment Il est engendré.

Le Filioque et l'énergie trinitaire incréée.

L'esprit de vérité qui procède du père.telle est la définition de l'Esprit inscrite dans le Credo,

L'addition par l'Eglise Catholique Romaine «du Père ET DU FILS» qui paraît minime a priori est la cause de maux importants aux conséquences redoutables. Saint Grégoire Palamas estime impie cette addition, ni prononcée par le Verbe, ni révélée par l'Esprit, ni trouvée dans les écrits des apôtres, le Saint voit ici, de la part de l'Église romaine, son dédain de la communauté de pensée orthodoxe et son mépris. On ne peut rien ajouter ni retrancher à ce que dit l'Evangile.

On peut essayer de comprendre en disant que si le Saint-Esprit, qui est le dispensateur de la Vie, procède aussi du Fils, cela induit que l'aspect vivant dans l'Eglise (l'Esprit) serait subordonné à l'institution de celle-ci, car assise par le Christ, tête de l'Eglise. La vie serait alors soumise à la juridiction, contrôlée et orientée par elle, favorisant toutes sortes de déviations et engendrerait la mort de la vie au profit de la loi, au niveau de l'organisation intime de l'Eglise.

L'action du Fils a été d'unir l'humanité en Lui-Même et lui rendre l'unité qu'elle avait perdue avec le péché,

L'action du Saint-Esprit concerne nos personnes afin d'adapter à chacun d'entre nous le mouvement d'union réalisé en Christ, tenant pour ainsi dire compte de notre histoire personnelle, familiale, génétique... Si l'Eprit procédait aussi du Fils, nous serions tous identiques, des parodies du Christ. Certes nous devons devenir des imitateurs du Christ, mais selon notre propre personne.



Le père est le seul principe de la Trinité, et la Trinité des personnes est le seul principe commun des créatures.

 

Essence et hypostase.

Comment chacune des personnes peut-elle, tout en possédant le caractère unitaire de la divinité, être distinctes en même temps.

Saint Grégoire Palamas répond que l'Union des personnes est telle, leur consubstantialité si parfaite que chaque personne est porteuse de toute la richesse de la divinité, chacune étant Dieu tout entier.

Mais chacune a ses propriétés personnelles propres et incommunicables et distinctes, sans confusion ni division.

Mais il ajoute que les 2 (hypostase et essence) étant incréés sont inséparables l'une de l'autre.

Mais Saint Grégoire Palamas introduit une autre différence entre hypostase et caractère hypostatique: les caractères hypostatiques ne peuvent s'identifier aux hypostases, qui seraient alors supérieurs à 3.

Voyons pour le Père: son hypostase est caractérisée par le fait que le père est inengendré. Ceci n'appartient pas à l'essence ou la nature, mais aux propriétés hypostatiques. En effet, si on identifie l'engendrement avec la nature, alors la naissance du Fils devient une création comme n'étant pas de la nature, ce qui fut l'hérésie d'Arius.

Ainsi, on peut nommer le Père puissance qui subsiste sans engendrement, mais aussi à partir de laquelle existe la puissance divine qui existe par engendrement, le Fils, et puissance divine qui existe par procession, l'Esprit. Donc ni le Fils, ni l'Esprit n'ont l'engendrement et la procession, caractère hypostatique, mais la création est un acte commun des 3 personnes. Le Fils étant engendré et l'Esprit procédant du Père, ils sont «causés»,

ils ont le Père comme unique cause et principe mais aussi cause sans principe,

On peut dire que le Père dans la mesure où il est cause est plus grand que les 2 autres.

Comment concilier ceci?

Personne n'a jamais vu Dieu.

Personne ne peut voir ma face et demeurer en vie.

Et pourtant:

Bienheureux, c'est que ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu.

Nous le verrons face à face

J'ai vu Dieu face à face, dit Jacob, et mon âme a été sauvée.

Pour Saint Grégoire Palamas, on est ici devant les Antinomies sur Dieu. Le visible et l'invisible, le compréhensible et l'incompréhensible.

Pour ceux qui en sont dignes, Dieu communique d'une façon ineffable. C'est ce que «voyait» Adam, ce que virent Pierre, Jacques et Jean lors de la Transfiguration. Cette puissance, cette gloire, cette lumière, c'est la révélation de ce rayonnement et de cette gloire. Pour les Pères, le caractère incompréhensible et transcendant de Dieu n'est pas le simple fait de la faiblesse humaine ou de l'intellect humain, mais sa propriété. Rien ne peut abolir le caractère incompréhensible de Dieu,

Citation.

Notre Dieu nous est à la fois compréhensible et incompréhensible, afin qu'attirant vers Lui, par ce qui est compréhensible, Il soit aussi admiré par ce qui est incompréhensible.

Ainsi, Dieu est participable par ses énergies.Tout ce qui est autour de l'essence, puissance, énergie, présence, volonté, faculté de créer est proche de Dieu et contemplé selon chacune des 3 hypostases.